ROUQUINE

Rouquine est, comme son nom l’indique, un duo masculin aux cheveux gris-bruns. Ce goût du contre-pied en dit long sur la volonté des deux chanteurs de se définir par ce qu’ils ne sont pas et ainsi de questionner, de déstabiliser, de surprendre.Les mélodies des refrains ressemblent à des comptines modernes, celles des couplets sont influencées par le rap français et la pop anglaise. Quant aux textes, qui lient crudité des sujets abordés à poésie et musicalité, ils décrivent de façon frontale et ciselée tous les moments charnières de l’existence, de la naissance à la fin de vie en passant par la première rencontre sexuelle, écrite sous forme d’une bagarre érotique. Le corps est mis dans tous ses états, et y a rien de criminel à trouver ça mortel.Évoluant depuis plus de 2 ans dans une esthétique qu’on pourrait qualifier d’électro-pop chantée en français, Rouquine n’a pas perdu son temps. Nino Vella (compositeur) et Sébastien Rousselet (auteur) commencent par sortir 4 titres en ligne et font quelques concerts pour roder leur set tout neuf.Sélectionnés en 2021 par l’équipe de Nagui pour participer à l’émission télévisée The Artist, un talent show d’auteurs-compositeurs diffusé sur France 2, ils remportent le trophée de la 1e place. Ils sortent à la même époque et sous leur propre label un EP dont le titre phare « Mortel » sera diffusé sur France Inter ainsi que sur de nombreuses radios françaises (RTL2, Europe 2, France Bleu, Virgin Radio…). Enchaînant les concerts sur tout le territoire et même au-delà (Suisse, Belgique et jusqu’en Chine) avec entre autres les 1e parties de Gaëtan Roussel (dont un Olympia) et celles de Jérémy Frérot, ils préparent leur premier album, « Masculine », qui sortira en août 2022 en coproduction avec le label PlayTwo.Invités fin 2021 par Nagui au Zénith de la Villette pour un Taratata dédié à la Fondation pour la Recherche Médicale, Seb et Nino le retrouvent l’année suivante pour leur propre Taratata, dont ils vont même assurer la co-programmation. Si on leur avait dit tout ça en 2010 ils ne l’auraient pas cru.2010, c’est l’année durant laquelle les deux musiciens se sont connus dans le Maine et Loire. Ils ont acquis une solide expérience de la création de chansons et de l’occupation de la scène avec le groupe Babel au sein duquel ils ont tourné pendant 8 ans.La scène justement, c’est l’endroit où le binôme dispose ses titres comme un terrain de jeux où il peut évoluer librement et où tout se concrétise enfin. L’instant de vérité reste la rencontre avec le public. Rouquine joue sur un plateau quasi nu (un clavier et un contrôleur destiné à envoyer des séquences)et dispose ainsi de tout l’espace pour déployer sa musique et faire résonner ses deux voix. Les arrangements studio sont volontiers modifiés, les rythmiques amplifiées pour que l’on ressente le besoin de bouger, le tandem s’autorisant quelques passages club pour son propre plaisir et celui du public.Une manière de laisser le corps reposer l’esprit pour mieux digérer les mots, avant de créer une rupture avec un piano voix tout en émotion tendue. Le contre-pied, toujours. Lorsque dans le même morceau coexistent mélodie solaire et propos existentiel, le drame et la fête sont toujours enlacés.Comme une marque de fabrique, une griffe dont on garde longtemps l’empreinte sonore. La griffe est aussi visuelle, sous la forme sobre et efficace de leur logo. Les deux lettres centrales de leur patronyme OQ brillent en fond de scène et découpent à couleur et intensité variables leurs longues silhouettes. Un terrain de jeux donc, où les deux chanteurs s’amusent à se couper la parole et à se la redonner sous une forme de passe-passe, s’amusent avec le public en le bousculant, en l’interpelant, en l’invitant à chanter, et s’incrustent même parmi les spectateurs au gré de l’ambiance qui s’échauffe et se survolte. Bref, Rouquine sur scène c’est du spectacle bien vivant.Dans l’intervalle entre la dissolution de leur premier groupe et la création de Rouquine, Seb et Nino avaient commencé à écrire des chansons pour des artistes de la scène française. Certains sont aujourd’hui invités sur le 2e album de Rouquine, qui sortira le 1er mars prochain et s’appellera « Mammifère ».Les influences restent les mêmes. Résumons brutalement : James Blake et Alt J pour la composition, Renaud et Orelsan pour les paroles. Puissance du beat et mélodies entêtantes, ironie mordante des mots et thématiques inhabituelles traitées sous des angles très personnels : une PMA faite maison (eux disent plutôt PAA pour Procréation Amicalement Assistée) dans L’amour à la main, un pote pénible et menteur compulsif dans Mytho (avec le rappeur Kikesa), Populaire fait quant à lui la chronique d’un petit prolo de province et Dans les orties raconte la tendance du désir à s’éteindre même quand l’amour dure. Le ton est encore une fois mi grinçant mi caressant mais les mots sont ici moins portés sur les choses du sexe, les thématiques se font un peu plus politiques